Dans une déclaration, hier, les évêques ont été cash sur la situation nationale et estiment que le pays est en perdition. Les politiciens, dirigeants ou opposants, sont les coupables désignés.
À l’agonie. En résumé, ce serait l’état actuel de Madagascar, selon la Conférence des évêques de Madagascar (CEM). Après trois jours de réunion extraordinaire, le verdict de la Conférence épiscopale catholique est sans appel, « Le pays est en perdition ».
En cause selon le CEM, un cheminement qui tend à mener vers une rupture du lien social, à annihiler les valeurs, la vertu et la culture Malgaches. Une situation favorisée par l’avidité, l’insécurité, la corruption, la mauvaise gouvernance politique et économique, la gabegie et, surtout, la pauvreté.
« Madagascar est malade. Il y a même ceux qui affirment que la nation agonise », soutient le message, lu par son président, Monseigneur Fulgence Rabemahafaly, à la radio Don Bosco, hier. Et la déclaration des évêques n’est pas tendre avec la classe politique.
« Cette situation chaotique est due aux pouvoirs successifs qui n’ont pas su tirer les leçons des maladresses de leurs prédécesseurs », affirme le CEM. En première ligne, la Conférence épiscopale fustige la défaillance du pouvoir en place qui, d’après elle, est incapable de proposer de solution adéquate pour renverser la tendance délétère de la conjoncture.
« Incompétents, inefficaces, enclins aux promesses creuses et aux mensonges, encourageant la violence », sont les mots utilisés par les évêques dans leur réprimande contre les gouvernants.
Le CEM déplore, particulièrement, le fait que le Gouvernement « soit incapable » de proposer un programme clair permettant aux citoyens d’entrevoir un avenir meilleur. Les failles dans l’éduction ont, particulièrement, été soulignées car, au même titre que la pauvreté, les évêques estiment que les lacunes et insuffisances dans ce domaine est aussi la cause du naufrage national. Outre l’insécurité chronique, la santé a également été soulignée.
La Conférence épiscopale s’est ainsi permis de détourner un dicton malgache en soutenant qu’actuellement dans les hôpitaux et les centres de santé « au lieu d’être accueillis et traités comme des seigneurs, les malades sont refoulés ».
Renouvellement
La déclaration des évêques n’a également pas épargné les opposants, notamment, ceux qui donnent de la voix ces dernières semaines, en martelant dans leurs arguments les points de vue de l’église et ceux de Justice et paix.
« Il ne faudrait pas abuser (…) eu égard à l’histoire et à la conjoncture, leur objectif est de briguer le pouvoir, se partager des sièges et se remplir les poches. Souvent ce sont ceux qui ont tambouriné le changement qui, une fois, au pouvoir se taisent et ne font rien. Pour nous cela suffit. La gestion du pays ne se fait pas avec des palabres et nécessite un changement de comportement, une nouvelle vision et une culture politique animée par l’amour de la nation et une prise de responsabilité », vilipende le CEM.
Étant donné la conjoncture et face à une classe politique qu’à l’écoute de la déclaration d’hier, le pays semble être autant en perdition, la Conférence épiscopale propose des solutions en sept points. Parmi elles, la prise de responsabilité des « nouvelles personnes vertueuses, conscientes qu’être au pouvoir c’est servir le pays et les citoyens », pour redresser la barre.
« Des personnes animées par le patriotisme, le souci de l’intérêt général, pour requinquer l’administration étatique et redonner de l’énergie à la population (…) ».
Outre le renouvellement de la classe politique et l’amélioration du système éducatif, les évêques recommandent aussi le respect par tous les lois et la responsabilisation, ainsi que l’implication du citoyen dans la vie étatique afin d’éviter que la population n’ait d’ultime recours que « la sédition », et pour qu’il s’imprègne progressivement de la culture de « l’alternance démocratique ».
Le CEM parle de représailles
« Respect du droit et de la liberté de religion », et « une demande à l’État de protéger ce droit et cette liberté des croyants », figurent aussi dans les recommandations du CEM. Dans sa déclaration d’hier, la Conférence épiscopale déplore, en effet, ce qui s’apparente à des représailles contre l’église chrétienne, particulièrement, l’église catholique. Elle énumère, entre autres, les vols de clochers ou encore, l’augmentation des droits de séjour des missionnaires, alors qu’en face « le plan d’attaque de certains extrémistes qui se cachent derrière des religions s’affirmant comme sauveurs se renforce ».
Garry Fabrice Ranaivoson