Le sénateur de Fianarantsoa demande la démission du directeur général du Bianco. Pour lui, cette entité ne respecte pas des bases fondamentales.
Déclaration de guerre. En toute vraisemblance, c’est le sens de l’intervention du sénateur Riana Andriamandavy VII, durant la séance de questions-réponses d’hier, au Sénat Anosy. La prise de parole du membre de la Chambre haute élu dans la province de Fianarantsoa a été un réquisitoire contre le Bureau indépendant anti-corruption (Bianco), conclu par une demande de démission de Jean Louis Andriamifidy, directeur général de cet organe sis à Ambohibao.
« Je terminerai par cette phrase : je demande la démission du directeur général du Bianco », a lancé à l’assistance le sénateur Andriamandavy VII, pour conclure sa première prise de parole. Une intervention durant laquelle l’élu de Fianarantsoa a soutenu que le Bureau anti-corruption « ne respecte pas la présomption d’innocence et le droit à la défense ».
Une enquête sur une affaire de détournement de deniers publics impliquant plusieurs communes, « treize », selon les révélations du sénateur hier, est affectuée par le Bianco depuis plusieurs mois. Une partie du dossier concernant la commune d’Ambohimahamasina, dans la région Haute Matsiatra, de la province de Fianarantsoa, a été transférée à la Chaîne pénale anti-corruption (CPAC), la semaine dernière.
Le maire d’Ambohimahamasina est l’un des principaux prévenus dans ce dossier. Dans sa prise de parole à Anosy, Riana Andriamandavy VII a soutenu qu’en tant que sénateur, « mon rôle constitutionnel est de défendre les intérêts des collectivités, dont les maires ». Selon ses dires, en apprenant l’arrestation et détention par le Bianco du maire d’Ambohimahamasina, « j’ai accouru au siège du Bianco à Ambohibao, avec un avocat pour le défendre, le dimanche [27 novembre] à 19 heures 30 ».
Indépendance
Le sénateur s’est plaint de ne pas avoir été reçu et avoir été « traité avec dédain » par le personnel présent,
« sans égard du droit à la défense ». L’heure tardive et le dernier jour du week-end pourraient expliquer cette scène. Un point qui, visiblement, motive les ressentiments de l’élu de Fianarantsoa, est que la presse a été avertie de son déplacement au siège du Bianco.
Riana Andriamadavy « accuse » cette entité d’avoir informé la presse des détails de l’enquête « au mépris de la présomption d’innocence et de l’honneur des personnes impliquées ». De retour d’un voyage à l’étranger, hier, Jean Louis Andriamifidy n’a, pour l’heure, pas réagi à la déclaration d’hostilité lancée par le sénateur de Fianarantsoa.
La loi datant de 2004 concernant le Bianco dispose, toutefois, que « l’indépendance du Bureau est garantie par la sécurité de la fonction de ses dirigeants (…). Dans l’exercice de sa fonction, le Directeur Général est protégé de toute forme de pression ou intimidation provenant d’entités politique, économique ou autres ». Ce qui expliquerait la réaction de Charles Andriamiseza, ministre de la Justice, soutenant devant les sénateurs : « Cela ne nous concerne pas. Nous respectons l’indépendance de cet organe ». Le même texte prévoit, du reste, une procédure de révocation du numéro un de l’organe anti-corruption.
« Il ne peut être mis fin aux fonctions des dirigeants du Bianco (…) qu’en cas de décision de révocation prise à l’issue de plaintes ou dénonciations déposées et avérées sur l’incapacité ou le comportement indigne ou inapproprié en vertu d’une recommandation du Conseil supérieur de lutte contre la corruption, délibérant à l’unanimité de ses membres et présentant un caractère de gravité suffisant », soutient la loi de 2004. Quant à la démission, les juristes s’accordent à dire que la décision appartient entièrement à Jean Louis Andriamifidy.
Suspicions d’interventionnisme
La déclaration d’hostilité à l’endroit du Bianco, de son directeur général en particulier, de la part du sénateur Riana Andriamandavy VII, découle du dossier de soupçon de détournement de deniers publics dans la commune rurale d’Ambohimahamasina, notamment. Certaines informations indiquent que l’élu de Fianarantsoa pourrait être parmi les personnalités éclaboussées par l’affaire, étant donné qu’au moment des faits, en 2014, il était encore chef de la région Haute Matsiatra.
Claudine Razaimamonjy, opératrice économique et membre de la famille de l’épouse du sénateur Andriamandavy VII, est aussi pointée du doigt dans le dossier. Aux yeux de certains observateurs, ces faits pourraient motiver l’opposition farouche de l’ancien responsable régional aux méthodes du Bianco. Certains suspectent une tentative d’intervention. Devant ses pairs de la Chambre haute, Riana Andriamandavy VII a expliqué ses actes par l’accomplissement de son rôle constitutionnel qui consiste à défendre les intérêts des collectivités territoriales.
Garry Fabrice Ranaivoson