Les autorités concèdent l’existence de « dahalo » en col blanc. Le corporatisme et la corruption protègeraient ces derniers contre poursuites et sanctions.
Immunité. L’existence de « dahalo en col blanc » n’est plus un secret pour personne. Responsables étatiques et des forces de l’ordre ont déjà déploré ces réseaux mafieux qui s’engraissent dans le blanchiment des bovidés volés. Des personnalités qui semblent à l’abri de toute poursuite judiciaire, et même de sanctions professionnelles.
Durant un entretien, un haut responsable étatique, sous couvert d’anonymat a confié que « le système est déjà profondément gangréné. Le corporatisme et la corruption, profondément ancrés, protègent ces dahalo en col blanc ». Le vol de bovidés est certainement le plus important problème sécuritaire à résoudre à Madagascar. Bien que les opérations spéciales pour mettre fin aux sévices des « dahalo » sur terrain soient fréquentes ces dernières années, une fois que les troupes militaires se retirent des champs de bataille, les voleurs de bovidés reprennent immédiatement leur dynamique meurtrière.
Les razzia des « dahalo », à en croire les affirmations des responsables, ne seraient que la partie émergée de l’iceberg. Entre les voleurs et les acheteurs existerait ainsi un contingent de personnalités véreuses, issues de plusieurs corps de métiers publics pour blanchir les bovidés volés, et immuniser les « gros bonnets » contre la loi. Un fait concédé par les forces de l’ordre, et réaffirmé par Solonandrasana Olivier Mahafaly, Premier ministre et chef de l’administration, lors d’un discours prononcé à Fianarantsoa en décembre.
Procédant au lancement officiel de l’opération « Mazava » dans la province de Fianarantsoa, le locataire de Mahazoarivo a déclaré « (…) Il ne s’agit plus de simples vols de bovidés, mais il existe un véritable réseau mafieux (…). Certes, il ne s’agit pas de se jeter la pierre
(…), mais il faut le dire, il y a, parmi nous fonctionnaires, certains qui sont impliqués dans ces réseaux ».
Périlleux
La source, durant l’entretien privée a reconnu que des responsables civils à plusieurs niveaux de l’administration « des représentants de l’Éat, jusque dans les hautes sphères », des militaires, des policiers, des gens de la justice « dont des magistrats », ou encore, des élus locaux, baignent dans le business illégal des bovidés. Durant les moments bouillants de l’opération « Fahalemana », qui ont coûté plusieurs hommes aux forces armées et qu’en face, les exactions de certains d’entre eux ont été fortement pointés du doigt par les organisations de défense des droits de l’Homme, des chefs militaires ont déjà affirmé connaître « les dahalo en col blanc » et sévir.
Les paroles n’ont toutefois pas encore été suivies d’actes, jusqu’à l’heure. Ces réseaux mafieux font pourtant que la lutte contre les « dahalo » tend à devenir une guerre sans fin. A entendre les propos de la source les membres des réseaux, ils sont identifiables, et appliquer la loi et engager des poursuites judiciaires, ou du moins, des sanctions administratives suffiraient à briser les réseaux. Seulement, lui-même reconnaît que « le corporatisme et la corruption font que c’est difficile ».
Lorsque des personnes sont protégées par leurs supérieurs hiérarchiques, des privilèges de juridiction ou administratives rendent difficile l’application de la loi. « Il faudrait, effectivement, du courage pour éradiquer ces réseaux, seulement il faudra s’attendre à de multiples représailles. Il faudra le faire au péril de sa vie. Ce qui n’est pas toujours évident lorsqu’on y réfléchit », conclut la source.
Garry Fabrice Ranaivoson