Sur la base de l’article 40 de la Constitution, la HCC refuse le statut d’institution de l’État au CFM. Vices protocolaires, excès et autres abus s’en dévoilent.
Stricte. Dans sa décision de contrôle de constitutionnalité de la loi sur la réconciliation nationale publiée, vendredi, la Haute cour constitutionnelle (HCC), a souligné que seules les entités énumérées dans la première partie de l’article 40 de la Constitution portent le titre d’institution de l’État.
« (…) aux termes de l’article 40 de la Constitution, il est indiqué que, « les institutions de l’État sont : La présidence de la République et le gouvernement, l’Assemblée nationale et le Sénat, ainsi que la Haute cour constitutionnelle », rappelle la Cour d’Ambohidahy. À elle d’ajouter « qu’en matière constitutionnelle, il n’est pas loisible au législateur de modifier une énumération commise par la Constitution de manière exclusive, celle-ci étant d’interprétation stricte ».
La raison de cette précision des juges constitutionnels est l’article 2 de la loi sur la réconciliation nationale qui érige le Conseil du Fampihavanana Malagasy (CFM), « au rang d’institution de l’État », et son article 24 qui dispose que le président cette entité « occupe le rang protocolaire d’un chef d’institution ». Si la HCC a déclaré le texte conforme à la Constitution, elle a cependant juste jugé anticonstitutionnelle les deux dispositions précitées, et demandé qu’elles soient « extirpées » de la loi sur la réconciliation nationale.
Le CFM est ainsi relégué au rang de simple « organe constitutionnel ». Dans la pratique pourtant, le verrouillage prescrit par l’article 40 de la Constitution que la Cour d’Ambohidahy vient de bétonner n’est pas aussi hermétique. Dans les évènements officiels, comme lors de la cérémonie de présentation des vœux, à Iavoloha, le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est estompé du rang protocolaire de chef d’institution.
Anarchie
Contrairement au CFM, la CENI n’est par ailleurs pas stipulé formellement dans la loi fondamentale. « L’organisation et la gestion de toutes les opérations électorales relèvent de la compétence d’une structure nationale indépendante », indique juste la Constitution, lorsqu’à son article 168 il est dit : « Dans le cadre du processus de réconciliation nationale, il est institué un Conseil du Fampihavanana Malagasy ».
Comme la HCC a tranché, quelques corrections s’imposent donc. Surtout que certaines personnalités ont dans l’idée de briguer la présidence d’autres organes constitutionnels que sont le Haut conseil pour la défense de la démocratie et de l’État de droit (HCDDED), ou encore du Haut conseil de défense nationale (HCDN), dans l’optique d’avoir le titre de chef d’institution, dans le sens « institution de l’État », arrogé de toutes les prérogatives et privilèges qui vont avec.
Pour les profanes, le signe extérieur indiquant que l’on a affaire à un chef d’institution se démontre lorsque sa voiture de luxe bénéficie d’ouvreuse, pour en faire un convoi prioritaire. Outre l’organisation protocolaire, l’excès et abus entrainé par la confusion sur les statuts et privilèges des personnalités étatiques et même administratives gênent le quotidien du citoyen lambda.
Il est devenu monnaie courante de voir de simples ministres s’arroger la prérogative d’avoir une voiture ouvreuse, ou d’allumer les feux de détresse de leur grosse cylindrée pour signifier de leur céder le passage, ou pour rouler à tombeau ouvert en contre sens. Pareillement, pour certains hauts responsables de l’administration et les élus, particulièrement les parlementaires et leurs proches qui abusent de l’usage de la cocarde, afin de non seulement outrepasser les normes de la circulation, mais aussi les contrôles.
Une « instruction » formulée en conseil des ministres durant la Transition a restreint les privilèges en matière de circulation aux seuls chefs des institutions de l’État. Une dont la valeur juridique est discutable et n’a pas été suivie d’acte. Ranesa Firiana, juriste, explique que « l’absence de texte juridique pour le règlementer, ainsi que de sanctions », est la raison de cette anarchie.
Garry Fabrice Ranaivoson