Au fil des années, les hostilités entre le pouvoir Rajaonarimampianina et certains de son ancienne famille politique semble s’être estompées. Devant la presse, samedi, l’AV7 a hurlé son allégeance au chef de l’État.
Domptés. Outre quelques irréductibles, Hery Rajaonarimampianina et le parti « Hery vaovao ho an’i Madagasikara » (HVM) ont, au fil des années, réussi à « soumettre » la plupart des plus tenaces des militants de « la révolution Orange » de 2009.
Avec l’Association des victimes du 7 février 2009 (AV7), c’est peut-être le noyau dur des militants du mouvement conduit par Andry Rajoelina, ancien président de la Transition, qui bascule dans le camp des Bleus. Un changement de couleur et de bord politique déjà entamé par Bona Jean Pierre Rafaramandimby, président de l’AV7 et quelques membres de cette entité, depuis l’année 2015. À l’écoute des propos tenus durant une conférence de presse que ces derniers ont donné samedi, à Andrefan’Ambohijanahary, le fait de virer de l’Orange au Bleu est définitivement fait et « assumé ».
Devant la presse, à part annoncer leur intention de déposer des gerbes de fleurs sur la stèle en mémoire des victimes à Ambohitsirohitra demain, tout en affirmant l’unité de l’association, l’AV7 a souligné son « allégeance » au chef de l’État. « Nous sommes tous maintenant des fonctionnaires. Cela, grâce au président de la République. Nous lui en sommes infiniment reconnaissants », ou encore, « nous défendons le choix de la population à l’issue des élections » sont des phrases dites durant la conférence de presse.
Lorsqu’en 2015 et 2016, il était juste question d’un rapprochement entre l’association et le pouvoir, étant donné qu’il a pris en charge l’allocation des indemnisations des « rescapés » du « samedi rouge », ces derniers affichent désormais leur camp. Le 7 février 2009, la foule de manifestants de « la révolution Orange », qui s’est ruée sur le palais d’État d’Ambohitsirohitra, a été criblée par les balles d’éléments armés, indiqués comme assurant la sécurité des lieux.
Docile
Un « carnage » qui a été le tournant du mouvement pour défaire du pouvoir Marc Ravalomanana, ancien président. Voir l’AV7 répondre au schisme et troquer la casaque orange pour le bleu indique que face aux arguments pécuniaires, la hargne politique s’écroule aisément. Durant la commémoration de la tragédie du 7 février 2009 en 2014, l’association des victimes a en effet encore scandé à tue-tête leur « fidélité indéfectible » à Andry Rajoelina et « à la cause de la révolution Orange », et a invectivé le pouvoir « de trahison ».
Il faut dire qu’au début du mandat de l’administration Rajaonarimampianina, le camp de l’ancien président de la Transition était encore en pleine possession de sa force politique et de la surface financière qui va avec. L’AV7 et d’anciens haut-parleurs du camp Rajoelina « amadoués », le pouvoir a visiblement réussi son coup. Parvenir à « une stabilité politique », soit en usant des prérogatives « régaliennes » pour mater et museler ses adversaires, soit les soumettre en faisant parler la poudre pécuniaire.
Aussi, entendre les leaders de l’association des victimes du 7 février déclarer: « Nous refusons dorénavant d’être des pantins politiques » semble ironique. En marge de la conférence de presse de samedi, certains membres de l’AV7 ont déploré « des zones d’ombre dans la gestion des sommes allouées à l’association et de certains choix. Par crainte de représailles pourtant, personne n’ose en parler ».
Face au rouleau compresseur mis en marche par le pouvoir pour aplanir l’échiquier politique, même les irréductibles du groupe des partisans de Andry Rajoelina (MAPAR), commencent à afficher une certaine « docilité ». Sauf changement, les Oranges devraient commémorer le 7 février 2009 sobrement cette année. MAPAR pourrait ne pas avoir le choix, vu que la présence d’Andry Rajoelina est fortement incertaine, et que la majorité de ceux qui « ont osé » prendre des balles ont quitté les rangs.
Garry Fabrice Ranaivoson