La résistance pacifique et l’activisme, des mots qui sont entrés dans le langage quotidien. Dans le contexte difficile de Madagascar, où la loi est peu clémente et liberté d’expression et déstabilisation souffrent d’amalgame, et où les manifestations publiques tendent à verser dans la violence, l’appel à la résistance pacifique n’est pas toujours compris et est laborieusement relayé.
S’il est une figure connue de la résistance dans le domaine culturel et artistique, le groupe Mahaleo et son répertoire engagé font partie des plus connus. Un groupe qui s’est imprimé dans le patrimoine immatériel malgache, incarnant bien l’idée de résistance à la malgache. Pour Bekoto, artiste et sociologue, membre du groupe Mahaleo, « Les Malgaches ont toujours été un peuple résistant et actif. Autrefois, nous résistions contre les éléments naturels tels que les cyclones, la sécheresse. Mais au fur et à mesure que nous avançons dans l’histoire, nous devons aussi résister à d’autres injustices auxquelles nous ne sommes pas forcément bien préparés, comme résister face à cette insupportable pauvreté, face à ces deux poids deux mesures dont nous sommes victimes, face à ce système biaisé qui ne bénéficie qu’à une minorité ».
L’absence de dialogue et d’échanges entre gouvernants et gouvernés, et entre élus et population, enracine l’incompréhension dans la communauté. Éric Raparison, coordinateur national de la Solidarité des intervenants du foncier, dénonce ce silence qui envénime la cohésion sociale, estimant que les problèmes fonciers sont les exemples de cette situation déplorable.
« Le problème de Soamahamanina est foncier, bien qu’il ait été rongé par diverses récupérations. En ce qui concerne le non-respect de la loi sur l’exploitation minière, même sans disposition juridique et code minier, on peut déjà sévir en se basant sur la Constitution », commente-t-il.
« Mais l’État reste passif. Lorsque la population se révolte, on dit qu’elle a tort. Mais quand ce sont les puissantes sociétés qui enfreignent la loi, on les laisse faire. C’est problématique, et si le gouvernement n’agit pas pour le bien de la population, c’est la population elle-même qui se sent obligée d’agir de son propre chef », ajoute le coordinateur.
Le droit de se défendre
Pour l’écrivain Môssieur Njo, auteur de Lisy Mianjoria aux éditions RanjaSoa Publishing, la résistance est aussi une question d’éducation, un talon d’Achille dans la vie malgache : « Nous n’avons pas appris à réclamer nos droits et à accepter d’entendre ou d’être l’objet des réclamations. Nous résistons par le cœur ou alors nous faisons semblant d’accepter, avec amertume. Nous n’avons pas appris que nous avons d’autres choix. On ne se sait pas détenteur de choix. Cette connaissance n’est pas parvenue jusqu’à nous. »
Aujourd’hui, les raisons d’agir sont nombreuses, tout comme les formes d’intimidations de toutes parts également. Afin d’aboutir à la cohésion, il s’agit de revenir à une éducation citoyenne face à l’injustice, selon Bekoto.
« Comment le simple citoyen peut-il lutter contre l’injustice Il y a une éducation à faire pour expliquer qu’on a le droit de parler, de se défendre, de répondre, d’être solidaire et uni pour lutter contre l’injustice. Il y a une éducation à faire pour transformer notre vivre ensemble, notre résistance collective en une résistance civile qui nous apprend à dire on a le droit de se défendre sans verser dans la violence », conclut le membre du groupe Mahaleo.
Mialisoa Randriamampianina