Au bout de dix mois de détention préventive, le militant écologiste Clovis Razafimalala a écopé hier de cinq ans de prison, avec sursis. Parmi ses coaccusés, certains ont été condamnés à trois ans de prison ferme.
Dénouement d’un casse-tête judiciaire. Le procès du militant écologiste Clovis Razafimalala et de ses huit coaccusés s’est tenu hier, à la cour criminelle du tribunal de Toamasina. Ils sont poursuivis pour rébellion, incendie de dossiers et destruction de biens publics, dont le siège du district ainsi que le Palais du tribunal à Maroantsetra en ont fait les frais, le 14 septembre 2016.
Le verdict a été rendu dans l’après-midi, vers 15 heures. Clovis Razafimalala, coordinateur de la coalition Maroantsetra Lampogno, une virulente organisation de la société civile du Nord-Est luttant farouchement contre le trafic illicite de ressources naturelles dont le bois de rose, a écopé de cinq ans de prison avec sursis. L’un des principaux accusés, président d’une section du parti Tiako I Madagasikara (TIM) à Maroantsetra, a été pour sa part, acquitté au bénéfice du doute.
Ayant manqué à l’appel lors du procès, trois accusés ont été pour leur part, condamnés à trois années de réclusion criminelle, alors qu’ils ont déjà bénéficié de mise en liberté provisoire. Un mandat d’arrêt a été sorti à l’audience.
Pour ce qui est des préjudices, le district de Maroantsetra a demandé soixante millions d’ariary de dommages et intérêts, lesquels ont été revus à cinquante millions d’ariary, lorsque le verdict est tombé. Des réparations qui seront à la charge des accusés.
Lors du procès, Clovis Razafimalala a soutenu ne pas avoir pris part au rébellion. «Au moment des faits, le maire m’a joint au téléphone pour le rejoindre au bureau du district. Après, je suis d’emblée revenu à mon cybercafé. Je n’ai pas pris part à cette rébellion. Des témoins peuvent l’attester», a lancé Clovis Razafimalala dans sa version des faits. Curieusement, les témoins à décharge n’ont pas été appelés à la barre.
Représailles
Le fond de l’affaire repose sur un chèque sans provision d’un montant d’un peu moins de neuf cents millions d’ariary, pour lequel le
très influent opérateur économique du Nord-Est Eric Besoa, a poursuivi l’ancien maire de la commune rurale d’Anjahana, Mahavita Rodrigue, élu sous la bannière TIM.
La mise en garde à vue de l’ex-élu a viré à l’émeute, lorsqu’une foule d’individus déchaînés, exigeant sa libération a envahi le Palais du tribunal ainsi que le bureau du district, pour brûler des dossiers. L’ancien maire, opérateur de la filière vanille a dénoncé des malversations économiques de la part du plaignant. Un jeune homme a été mortellement blessé par balle lorsque les forces de l’ordre ont chargé les émeutiers. Les parts de responsabilité des deux opérateurs en conflit n’ont pas été pour autant examinées à fond lors du procès.
Avant que cette violence ne se soit abattue sur Maroantsetra, Clovis Razafimalala et ses compagnons de lutte contre le trafic des bois précieux ont multiplié les dénonciations de coupes et d’exportations illicites de bois de rose. La coalition a, dans la foulée, demandé la réinstallation des douanes, démontées au profit d’une force de gendarmerie, mise en place pour contrôler le port de Maroantsetra. Le lendemain, Clovis Razafimalala a été arrêté pour être conduit à Toamasina à bord d’un avion spécial affrété par un opérateur économique.
En moins de trente-six heures, des éléments de la section des recherches criminelles de la gendarmerie nationale à Toamasina, dotés des moyens nécessaires, ont débarqué à Maroantsetra pour se saisir de lui.
Depuis le début de l’affaire, la thèse selon laquelle Clovis Razafimalala serait victime d’un règlement de compte visant à paralyser la coalition Lampogno dans ses actions, a délié les langues. Lors des plaidoiries, la défense n’a pas manqué de dénoncer une procédure expéditive où des étapes ont été brûlées et les investigations négligées.
Seth Andriamarohasina