Le rapport annuel du Service de renseignements financiers (Samifin) de l’année 2016 montre de maigres résultats. Les maillons de la chaîne anti-blanchiment de capitaux sont encore défaillants.
Trop large. Les gros poissons peuvent encore souffler. Les mailles du filet du service de renseignements financiers (Samifin) à Madagascar sont trop larges.
Cette entité en charge de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme a présenté son rapport d’activité pour l’année 2016, hier en son siège aux 67 ha. Bien qu’en nette amélioration, les résultats présentés par le Samifin sont toutefois mitigés.
«Nous mesurons la réussite par les personnes incriminées qui sont sanctionnées et quand les fonds détournés rentrent dans les caisses de l’État», explique Boto Tsara Dia Lamina, directeur général.
Selon le rapport présenté hier, les premières condamnations pour blanchiment de capitaux par la chaîne pénale anti-corruption (CPAC) ont eu lieu en 2016. Ainsi, quatre dossiers ont été jugés dont trois ont abouti à des condamnations.
Il s’agit d’affaires liées aux fraudes fiscales et de trafic d’armes. Une nette évolution, mais comparés aux cent quinze déclarations d’opérations suspectes (DOS) et à la cinquantaine de dossiers transmis à la CPAC, les résultats sont forts maigres.
Coordination
En termes financiers, neuf milliards d’ariary ont pu être réintégrés dans la caisse de l’État. Toutefois, le montant en jeu sur les dossiers transmis au Parquet et aux autorités compétentes s’élève à quatre-vingt-douze milliards d’ariary.
La faiblesse des résultats obtenus puise sa source dans les capacités de la Justice à traiter les dossiers qui lui sont transmis. Actuellement, les cas de blanchiment d’argent sont jugés au niveau de la Cour criminelle au même titre que les braquages à main armée ou les homicides.
«Des compétences spécifiques sont nécessaires pour juger les affaires de blanchiment de capitaux donc il faut des magistrats spécialisés sur ce domaine», continue le DG du Samifin. Par ailleurs, l’évolution très rapide des techniques utilisées par les délinquants financiers corse le travail des limiers du Samifin.
Cette entité ne peut agir qu’à partir des déclarations d’opérations suspectes issues des entités assujetties. Il s’agit des banques, des casinos, des assurances, des bureaux de change, des institutions de microfinance et des opérateurs de mobile-money. «La coordination avec ces informateurs sont à renforcer pour que le Samifin puisse agir efficacement », argue-t-il.
Dans la foulée, le service des renseignements financiers malgaches élargit son horizon en intégrant les réseaux au niveau régional et international. À l’instar du Groupement d’action financière (GAFI) régional et de la demande d’adhésion au groupe Egmont, le Samifin veut s’aligner aux standards internationaux en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.
Pour y arriver, une réforme de la législation dans ces domaines est nécessaire. « Nous avons proposé trois projets de lois en 2016. Il s’agit de la loi sur le recouvrement des avoirs illicites, celle sur la coopération internationale et une modification de la loi anti-blanchiment de capitaux», continue Boto Tsara Dia Lamina et de continuer que les deux premiers projets de loi sont déjà adoptés en conseil des ministres et sont en passe d’être votés au Parlement.
«Nous avons déjà transmis au ministère de la Justice la loi sur la lutte contre le blanchiment de capitaux mais celle-ci n’a pas encore été discutée en conseil des ministres », a-t-il pesté.
En attendant ces lois et surtout les décrets d’application, les délinquants règnent en maîtres d’autant que l’économie à Madagascar est encore dominée par le secteur informel.
Andry Rialintsalama