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Jugement électoral – Pressions et menaces sur le tribunal administratif

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Le président du tribunal administratif a joué carte sur table. Hier, il a dénoncé les pressions et même les menaces subies par les juges durant l’instruction des requêtes et résultats des élections communales.

Déballage. Hier, le tribunal admi­nistratif d’Antananarivo a rendu son verdict sur les requêtes en contentieux concernant les élections communales. Un jugement qui n’a pas réservé beaucoup de surprises. Le coup d’éclat de la journée était le discours d’ouverture de la séance par Tsantatiana Randrianari­manana, président du tribunal administratif d’Anta­na- narivo. D’entrée, le magistrat a dénoncé « les pressions et les menaces ».
« Durant toutes ces semaines, beaucoup ont tenté de s’immiscer dans les affaires du tribunal. Je ne dirai pas qui ils sont, ils se reconnaîtront certainement. Il y avait des pressions et même des menaces. Moi-même, j’ai fait l’objet d’une menace verbale, le 31 août 2015. Un homme averti en vaut deux, m’a-t-on dit », révèle Tsanta­tiana Randrianarimanana.
La salle exiguë du tribunal administratif d’Anosy était comble hier. Candidats, personnalités politiques, avocats, journalistes et simples citoyens ont joué des coudes, sous une chaleur suffocante pour se faire une petite place et écouter le verdict des juges sur les contentieux des élections du 31 juillet. Le discours du juge Randrianari­manana a, pourtant, fini par réduire au silence cette cacophonie relative.
Indépendance
Il faut dire que, malgré le ton posé de son allocution, le jeune magistrat a mis en lumière un sujet grave. Un secret de polichinelle dans le monde judiciaire et particulièrement, en matière de juridiction électorale, systématiquement étouffé, le plus souvent par les juges eux-mêmes et notamment les plus gradés.
Le président du tribunal d’Antananarivo confirme ainsi, les inquiétudes de la presse et de l’opinion. Il va plus loin même en parlant d’intimidation. Le président du tribunal administratif s’est, pourtant, gardé d’indiquer qui sont ceux qui ont tenté d’influencer la décision des juges, assurant juste qu’aucun n’est concerné directement par les recours et les résultats des élections.
Pour, visiblement, dissiper tout doute sur la décision du tribunal, Tsantatiana Randrianarimanana a pris cinq minutes pour prononcer un discours d’ouverture. « (…) Le tribunal rend son jugement au nom du peuple malgache. Et en matière électorale, cela est un symbole plus fort, car il s’agit de préserver la démocratie et le choix du peuple. (…) Nous sommes fiers de dire que nous respecterons jusqu’au bout notre serment et ce verdict et les résultats qui seront proclamés, demain [ce jour], ne sont dictés que par notre conscience et la loi, dans la solidarité et la collégialité », argue-t-il.
Pour certains de ses pairs, les révélations du magistrat Randrianarimanana vont dans le sens d’une revendication de l’indépendance de la justice. « L’indépendance n’est pas donnée mais se conquiert, à commencer par les jugements prononcés », s’accordent-il à dire. D’un autre côté, c’est aussi une manière de se protéger ou bien de prévenir quant à l’éventuelle conséquence de leur acharnement à se battre contre les pressions.
« Cela pourrait aussi être une volonté de donner une nouvelle image de la justice, de la démystifier et de jouer la transparence », avance un magistrat contacté.
Durant les audiences des contentieux électoraux, le jeune président de tribunal a, en effet, affiché un style plus dynamique, rompant, quelquefois, avec le caractère auguste et cérémonieux de la Cour. Tsantatiana Randria­narimanana a même autorisé les caméras, appareils photos et enregistreurs sonores dans une salle de séance.
Membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), il reconnaît, néanmoins, que plusieurs faits déplorables pourraient justifier l’absence de confiance envers la justice et tacle même la caducité des textes, surtout, électoraux.
Ce n’est pas la première fois que les jeunes magistrats revendiquent publiquement l’indépendance de la justice, mais probablement jamais en pleine audience. En faisant un tel déballage public avant un verdict de contentieux électoraux, Tsantatiana Randrianarimanana a, vraisemblablement, voulu frapper fort pour mettre un terme à une pratique qui gangrène le monde judiciaire. Reste à voir si cela fera son effet et des adeptes.


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