Les 98% de Viktor Orban sur 40% de la population hongroise parlent mieux à tout le monde que les improbables 90% d’Ali Bongo sur un surréaliste taux de 99% de participation, dans sa région natale au Gabon.
À l’appel du référendum hongrois contre la décision de l’Union Européenne, le chef de la diplomatie autrichienne a réagi en disant que l’UE devrait abandonner son plan «irréaliste» de répartition obligatoire de 160.000 migrants par an. Le quota de cette année, pour la Hongrie, devait être de 1294 personnes.
Des Européens, comme Viktor Orban, considèrent l’identité chrétienne comme inséparable de l’identité européenne. Quant au ministre luxembourgeois des Affaires Étrangères, Jean Asselborn, il parle d’exclure la Hongrie de l’UE pour «préserver les valeurs de l’Union Européenne». L’Europe, mais laquelle Celle des idées de Jean Asselborn ou celle des identités de Viktor Orban
Les anciens pays du «bloc de l’Est» semblent avoir surtout vu leur adhésion à l’Europe comme une protection contre les tentatives hégémoniques de la Russie. Du «projet européen», surtout en son volet démocratique et libéral, les exemples hongrois et polonais montrent que l’Europe n’a pas su en faire un préalable obligatoire de son élargissement : de l’Europe en deça de l’Oder-Neisse, vers l’Europe du Danube, vers les Balkans, voire à la Turquie…
Ironiquement, et paradoxalement, mais les groupes humains sont toujours nommés par leurs voisins les plus assidus à les envahir ou les plus fidèles à commercer avec eux, le mot de «Hongrie» viendrait du turc «Onogour». Et, sur leur route vers Vienne, capitale autrichienne du Saint Empire Romain Germanique, les troupes musulmanes de Souleiman le Magnifique ont parcouru les mêmes pays (Grèce, Bulgarie, Macédoine, Roumanie, Hongrie, Serbie, Bosnie, Croatie, Slovaquie) qui se trouvent actuellement sur l’itinéraire des migrants, fuyant la folie meurtrière islamiste au Moyen-Orient.
En 1526, le roi de Hongrie fut tué à la bataille de Mohacs par les troupes ottomanes. De 1541 à 1686, le coeur de la Hongrie fut une province turque, et Belgrade, capitale serbe, occupée par les Turcs de 1521 à 1688. Souleiman le Magnifique était contemporain de Charles Quint, dont le neveu Maximilien de Habsbourg, payait tribut au Sultan ottoman, en vertu du traité d’Andrinople (1568). Le deuxième siège de Vienne, en 1683, tout aussi infructueux que le premier, 150 ans auparavant, sera le signal du reflux continu des forces ottomanes jusqu’à leur base asiatique.
Il est humain, si les nations ont une mémoire, que les Slaves et les Magyars, qui ont été les plus intimement fouaillés par l’invasion musulmane, ressentent aujourd’hui encore le traumatisme des dates fondatrices : Kosovo, 1389 ; Mohacs, 1526 ; Mohacs, 1687…
«Je préfère un accord imparfait à une bonne guerre», avait dit le président colombien Juan Manuel Santos. Après que Rodrigo Londono, chef des derniers 7.000 guerilleros (sur les 20.000 qu’avait pu compter une guerilla partie d’un mouvement paysan), a proclamé un cessez-le-feu unilatéral, le 28 août.
Mais, le référendum, qui devait légitimer l’accord avec la guerilla des FARC, a vu la victoire du «Non». Les zones les plus touchées par une guerre civile, qui a fait 260.000 morts et 45.000 disparus depuis 60 ans, sont celles qui ont été favorables à l’accord de paix. Tandis que les villes ont dénoncé l’impunité et les trop grandes largesses accordées aux guerilleros. Ces derniers devaient bénéficier d’une vingtaine de sièges non élus dans les institutions de la République. À notre échelle malgache : c’est comme si les ruraux d’Anjoma-Ramartina, de Kandreho ou de Bekily, avaient approuvé un accord avec des «dahalo» repentis tandis que les Tananariviens, où siège le Parlement, ne voudraient pas voir importée dans leur citadinité la sauvagerie de voleurs de boeufs, de détrousseurs de taxi-brousse, de razzieurs de villages isolés.
L’accord de paix en Colombie avait été signé le 26 septembre 2016. Dès le 2 octobre, le pays était en mesure d’organiser un scrutin dans plus de 82.000 bureaux de vote, dont personne ne conteste ni les listes électorales ni le résultat. En Hongrie, le scrutin se déroula également sans contestation. Le régime a reconnu sa défaite juridique, le taux de participation étant trop faible au regard de la loi en vigueur. Dans les deux cas : un bon déroulement logistique, aucun souci d’organisation matérielle, nulle accusation de fraude, des résultats acceptés par tout le monde, et un deuxième tour de re-dialogue (Colombie) ou de procédure constitutionnelle (Hongrie). Pour ces cinq critères au moins, les deux référendums, hongrois et colombien, doivent nous interpeller, ici, à Madagascar.
Par Nasolo-Valiavo Andriamihaja