Règlementer le financement des partis et des campagnes électorales est nécessaire. Une démarche incontournable pour des élections réellement crédibles.
Problématique. Autant l’absence de réglementation du financement des partis politiques et des campagnes électorales en est une, autant la manière de mettre en place cette législation et l’appliquer en sont d’autres. C’est ce qui ressort d’une conférence-débat sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales, vendredi dernier, à la salle de conférence du ministère des Affaires étrangères, Anosy.
Indriamanga Rakotoarisoa, président du tribunal financier d’Antananarivo, Faraniaina Ramarosaona, du mouvement de la société civile Rohy, et Thierry Rakotonarivo, vice-président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), ont été les panélistes du rendez-vous. Tous trois se sont accordés à affirmer la nécessité d’une réglementation du financement des campagnes électorales et des partis politiques. Un avis entièrement partagé par l’assistance.
« Égalité des chances des candidats aux élections », « des élections réellement crédibles et démocratiques », ou encore, « lutter contre le blanchiment de capitaux » sont quelques exemples des arguments soulevés durant la conférence de vendredi.
« (…) si l’on veut un jour connaître ce que c’est qu’une véritable démocratie, ce que sont des résultats électoraux fiables et acceptés par tous, il va falloir procéder et plaider dans le sens de l’élaboration d’un cadre juridique règlementant le financement des partis politique et de la campagne électorale (…) », a soutenu le président du tribunal financier.
Dans son intervention, le magistrat financier a ajouté qu’en matière de financement des partis et des campagnes électorales, « il y a toujours de fortes suspicions de blanchiment d’argent ». Dans le cadre de ses projets de réforme du cadre juridique des élections, l’élaboration d’un texte réglementant les ressources financières à la disposition des entités et personnalités politique figure dans les plans. A l’écoute des prises de parole durant la conférence d’Anosy, la forme que prendra cette loi pourrait ne pas faire l’unanimité.
Rubicon
Le juge Rakotoarisoa a affirmé que « la réglementation du financement des partis politiques et celle de la campagne électorale ne peuvent pas être traitées séparément ». Le magistrat, dans sa logique, propose qu’étant donné l’urgence en attendant une loi, un décret devrait être adopté pour cadrer cette question financière dans la pratique politique et la participation aux élections. Un acte règlementaire qui prévoirait, notamment, un plafonnement des fonds, un impératif d’ouverture de compte bancaire, doublé d’une levée du secret bancaire.
Thierry Rakotonarivo, dans son intervention, s’est évertué à rapporter les résultats des multiples consultations procédées par la CENI en vue de la réforme du cadre juridique des élections. Il a soutenu qu’« il faut distinguer financement des partis politiques et financement des campagnes électorales ». Durant les débats qui ont suivi les exposés des panélistes, un membre d’une organisation de la société civile a toutefois lancé « depuis 1989, le KMF/CNOE a demandé cette réglementation, pourtant, nous en sommes encore à débattre sur le sujet aujourd’hui ». Une prise de parole qui indique que depuis près de 30 ans, les décideurs politiques ont refusé de franchir le Rubicon.
La réforme du cadre juridique des élections qui devrait donc comprendre « une réglementation du financement des campagnes électorales », mais aussi, à entendre le vice-président de la CENI, « une réglementation de la pré-campagne », n’est encore qu’au stade d’élaboration. Il faudra encore passer par une adoption en conseil du gouvernement et des ministres et passer l’épreuve parlementaire. Plus d’un souhaitent que la version issue des ateliers de concertation ne connaissent pas de « grands changements ». Durant la conférence d’Anosy, par ailleurs, certains ont fait remarquer qu’outre l’adoption de lois, il faudra aussi songer à leur application.
Garry Fabrice Ranaivoson