Corruption active et passive, exploitation illicite de bois de rose sont, entre autres, les charges retenues contre trois trafiquants présumés de bois de rose. Ils ont été placés sous mandat de dépôt, hier.
Antanimora. La maison d’arrêt est la destination prise par les trois individus auditionnés à la chaîne pénale anti-corruption des 67 ha, hier. Après neuf heures de comparution, Bekasy Johonfrince, un homme d’origine asiatique désigné sous le nom de Xiu et un certain Herizo, ont été immédiatement placés sous mandat de dépôt.
Pour le Bureau indépendant anti-corruption (Bianco), Bekasy Johonfrince est le présumé « gros bonnet », de l’affaire. Corruption active, corruption passive, exploitation et transport illicite de bois de rose, ainsi que, blanchiment de capitaux seraient les charges retenues contre lui. Bien que personne n’ait vu son entrée dans les locaux de la chaîne pénale, le présumé trafiquant s’y est bien présenté, selon une source avisée.
À ses côtés devant la Chaîne pénale, hier, un certain Xiu. Celui-ci selon les informations, serait « l’investisseur », également qualifié de « gros bonnet ». L’homme serait le dépositaire d’importants capitaux et de biens immobiliers dans la région Sava et la ville de Sambava en particulier, mais vraisemblablement, aussi à Antananarivo.
Le troisième larron qui se prénommerait Herizo est, en effet, un comptable dans un des centres commerciaux appartenant à un chinois de la capitale. Pour les deux derniers, les charges retenues seraient l’exploitation et le transport illicite de bois de roses, et blanchiment de capitaux. Le dossier a déjà fait l’objet d’une première comparution devant la Chaîne pénale en juillet.
Les inculpés en sont sortis libres, au bout de sept heures d’audition. L’absence de témoignage du ministère de l’Environnement avait été l’explication avancée par la justice.
La suite
Des arguments qui n’ont pas suffi à apaiser l’indignation de l’opinion publique. Surtout que, pour bétonner le dossier, le 22 juillet, jour de la première comparution, Jean Louis Andriamifidy, directeur général (DG), du Bianco a, parallèlement, tenu une conférence de presse, pour expliquer le contexte des investigations ayant mené à l’interpellation des trois personnes inculpées.
Selon le numéro Un du Bureau d’Ambohibao, ces présumés trafiquants sont concernés par l’exportation illicite de rondins de bois de rose saisis fin 2013 à Zanzibar avant d’être expédiés vers la Chine.
« (…) Si ces bois ont pu sortir, c’est qu’il y a eu corruption auprès de responsables. Après enquêtes, nous avons pu mettre la main sur ces gros bonnets. Il s’agit de ceux qui détiennent l’argent, les véritables propriétaires des rondins », avait ajouté Jean Louis Andriamifidy. La veille, l’organisation non gouvernementale (ONG), environne- mentale Alliance « Voahary Gasy » (AVG), avait lancé une interpellation aux autorités concernées pour que la loi soit appliquée. « (…) Nous craignons que cette personne impliquée dans le trafic ne soit mise en liberté provisoire », devait soutenir Andry Andriamanga, coordinateur national de l’ONG.
Après sa première décision sur le dossier, le 22 juillet, la Chaîne pénale a été étiquettée de maillon faible de la chaîne dans la lutte contre la corruption. Le DG du Bianco, lui-même, a déploré le fait que depuis sa prise de fonction, un seul mandat de dépôt a été prononcé par l’entité juridique sur les dossiers qui lui ont été transférés.
Dans ces conditions, il est probable que l’instance judiciaire des 67 ha ait voulu marquer le coup en envoyant sous les verrous les trois présumés « gros bonnets », du trafic de bois de rose.
Le Bianco veut, également, en faire un exemple de sa lutte impersonnelle contre la corruption. Quelques natifs de Sambava, présents aux 67 ha hier, estiment que Bekasy Johonfrince n’est qu’un « bouc émissaire », pour satisfaire l’appétit de l’opinion avide de gros poisson.
Certains ont officieusement pesté que des proches de hauts responsables du pouvoir transitoire et du régime actuel sont aussi impliqués dans le trafic, « pourquoi ne sont-ils pas inquiétés ». Etant donné l’ampleur du trafic de bois de rose, il serait effectivement logique de voir d’autres inculpations. En attendant, la date du procès des trois personnes acheminées à Antanimora, hier, n’est pas encore connue.