La vérité de prix est loin d’être appliquée pour les produits pétroliers. La dernière révision du prix à la pompe ne reflète pas encore le prix réel.
Une fuite en avant. La vérité des prix fait peur au gouvernement de combat qui évite à tout prix de l’appliquer, surtout pour les produits pétroliers. C’est le cas notamment au vu de la dernière révision du prix du carburant d’hier. Bien que les prix aient augmenté, ceux-ci restent toujours inférieurs aux prix réels. Le gouvernement continue ainsi à intervenir dans l’ajustement du prix du carburant, après l’avoir fait officiellement au mois de février. Pour justifier cette mesure, le ministère de l’Energie et des hydrocarbures avance toujours des contraintes conjoncturelles.
« Ces prix maxima découlent de la concertation entre le gouvernement et les pétroliers, qui a permis de reporter et de lisser les hausses prévues début février 2017 ; compte tenu des contraintes conjoncturelles actuelles, et ce dans le respect de l’intérêt général et des engagements pris par le gouvernement », a-t-il indiqué dans son communiqué d’hier.
Après avoir entamé une révision à la hausse du prix à la pompe en début février, le gouvernement, de concert avec les distributeurs de produits pétroliers, a fait marche arrière quelques jours plus tard en maintenant le prix appliqué en janvier. « Cette dernière révision du mois de mars est une sorte de rattrapage de ce rabais du
3 février mais elle reste toujours en dessous de la vérité du prix », a soutenu une source auprès de ce département ministériel. Cette initiative pourrait alléger les charges du gouvernement pour un éventuel remboursement aux distributeurs pétroliers de la différenciation du prix à la pompe au prix réel du carburant.
Méthode risquée
Pour décrocher le programme avec le Fonds monétaire international, le gouvernement avait annoncé la rupture avec ses mauvaises habitudes d’administrer le prix ou d’intervenir dans le prix du carburant. Son vœu le plus cher était d’appliquer la vérité de prix d’où la mise en place d’un nouveau mécanisme dans le mode de calcul du prix à la pompe en janvier 2016.
« La poursuite de la mise en œuvre d’une formule automatique de tarification pour assurer le recouvrement complet des coûts des carburants est un repère continu du programme économique soutenu par la FEC.Sa mise en œuvre constitue un des indicateurs sur la bonne marche du programme ainsi que de son évaluation », a souligné Patrick Imam, représentant résident du Fonds monétaire international (FMI) à Madagascar.
Mais cette mesure n’a duré que quelques mois seulement. Les autorités ont introduit un mécanisme de lissage de prix. Ce qui permet au gouvernement d’ajuster le prix du carburant affiché à la pompe. Depuis plusieurs mois, les hausses ou les baisses réelles des prix sont ainsi reportées de façon à éviter une trop grande fluctuation des prix. Au mois de décembre, le prix maxima du litre du gazole devait être de 3178 ariary et celui du super carburant était de 3707 ariary le litre. Mais les autorités ont ajusté ces prix à 3070 ariary le litre du gazole et 3640 ariary le litre du super carburant. Il peut néanmoins arriver que le prix affiché soit supérieur au prix réel, comme ce fut le cas en octobre où les consommateurs achetaient le gazole à 2910 ariary alors que le prix réél était d’environ 2850 ariary. En septembre, le gazole coûtait même 133 ariary plus cher que le prix réel.
Les autorités ont ainsi pu se constituer un « coussin d’amortissement » pour rattraper des hausses à venir. Mais le système n’est pas sans danger.
« Si les autorités continuent à ne pas appliquer la vérité des prix, les coûts implicites augmenteraient nécessairement et ramèneraient Madagascar dans un scénario où l’Etat doit combler les différentielles à partir des transferts du budget. Un tel schéma ferait revenir le pays dans la spirale où pour pouvoir assurer les différentes subventions qu’il a à accorder, l’Etat puiserait nécessairement sur les ressources d’autres secteurs dont les secteurs sociaux », a lancé Patrick Imam.
Lova Rafidiarisoa