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Halte aux gaspillages des aides extérieures

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Quatre grands principes pour mener avec succès les actions de développement. C’est l’un des sujets exposés par Philibert Tsiranana, président de la (Ire) République, le 10 octobre 1967 (lire précédente Note). « Prévoir selon nos besoins, c’est préparer l’avenir, c’est l’objet des grandes opérations de notre Plan. Réaliser selon nos moyens, c’est améliorer la survie immédiate, c’est, par exemple, animer les travaux au ras du sol », résume-t-il.
C’est un état d’esprit dans lequel chaque Malgache, surtout le technicien, doit organiser ses rapports extérieurs, son « comportement extérieur ». Celui-ci doit obéir également à trois principes, dont le premier est la connaissance parfaite des problèmes que l’on traite pour éviter lenteur et gaspillage. À ce propos, il critique  le fonctionnement des séances d’études, mal préparées, mal conduites et inutilement répétées.
« Cela est fréquent et les choses traînent. Un participant rappelle ce qui a été arrêté à une première réunion, un autre prétend ne pas être au courant alors qu’il représente son ministère. Ou bien le même fonctionnaire assiste à la deuxième séance, ou bien le second a les mêmes consignes que le premier et doit connaître le compte-rendu de la première réunion ; sinon, il y aura trois, quatre séances et toujours le ‘moramora’ ! »
Le principe suivant est la connaissance de l’administré et de ses problèmes, personnels ou collectifs. Pour ce faire, « il ne s’agit pas d’aller lui débiter de grands kabary dont le niveau d’expression le dépasse trop souvent ». Le chef de l’État conseille aux responsables et autres techniciens de le laisser s’exprimer, se confier « en manifestant toute la patience nécessaire ». Par la suite par des questions « simples et pertinentes», on lui fait préciser les points qui restent obscurs.
« Il faut faire parler le peuple et l’écouter, et non pas s’écouter parler au peuple ! »
Car, insiste-t-il, cela arrive trop souvent. « Le technicien, le parlementaire, le ministre, l’homme politique qui va à la campagne, s’écoutent et n’écoutent pas le paysan. Or, il y a beaucoup à apprendre du paysan. Mais on parle dans le vide et parfois, on emploie des termes étrangers. »
Poursuivant sur le même registre, le président Tsiranana s’adresse en particulier aux fonctionnaires.
« Devant les autorités, il arrive qu’un paysan essaie de parler et on l’en empêche. Mais avec mon hélicoptère, j’ai trouvé la méthode. Quand les autorités ont rendez-vous en un endroit où je dois les rejoindre par la voie des airs, elles partent avant moi, et je reste seul avec les paysans. Nous bavardons et j’apprends beaucoup de choses. »
Le Président annonce alors qu’il faut soutenir l’administré dans son action et surtout, l’encourager à exécuter, l’assister par tous les moyens dont on dispose, contrôler étroitement ses réalisations et le féliciter de ses initiatives. Toutefois, il met en garde que cela ne se fasse pas depuis le bureau, ni même « depuis la Tranom­pokonolona». C’est sur terrain que l’administré et le technicien doivent se rencontrer. Ce n’est pas à la population de se déplacer lors des visites officielles « avec tam-tam et kabary », souligne-t-il. C’est aux missionnaires, aux commissaires, inspecteurs et vulgarisateurs de s’approcher d’elle.
« Tout autre procédé est l’une des formes les plus graves du gaspillage, celui de l’énergie humaine. »
Pour terminer sur ce problème de « comportement externe », il revient sur la notion de gaspillage. Les opérations de développement entreprises avec l’aide financière et technique des pays amis et bailleurs de fonds, sont
« rigoureusement projetées, ponctuellement exécutées et minutieusement contrôlées ». C’est le moyen le plus sûr d’éviter le gaspillage. Et, met-il en exergue, « il doit en être exactement de même pour les opérations réalisées avec nos moyens propres ».
Revenant sur l’un des « maux
de notre époque » qu’est la « citadi­nite», il propose comme remède la « ruralisation » et l’utilisation des diplômes à la campagne, dans les activités individuelles et indépendantes. Se faisant plus explicite, il soutient que le petit paysan instruit et détenant des diplômes- « et l’État lui en assure tous les moyens s’il a les aptitudes nécessaires »- peut devenir propriétaire d’une exploitation agricole. En effet, précise-t-il, aucun capital intellectuel ne court le risque de rester sans profit à la campagne.
Cependant, si vraiment « le virus du fonctionnariat » le travaille, il pourra trouver un emploi rémunérateur dans de meilleures conditions d’existence qu’à la ville, s’il intègre les secteurs publics et parapublics de l’agriculture, de l’élevage, des forêts ou des coopératives. « Vivant à la campagne, il pourra s’assurer des commodités que ses moyens ne lui permettraient pas en ville.» Et d’ajouter : « De deux ouvriers de même catégorie, si celui de la ville gagne 30 000 francs par mois et celui de la campagne
20 000 francs, celui de la campagne vivra mieux que celui de la ville.»
Il profite enfin de l’occasion pour critiquer les syndicalistes qui font des erreurs dans leurs revendications. « Les chiffres dans l’absolu sont trompeurs. Il ne faut pas perdre de vue la notion du pouvoir d’achat entre les riches américains qui ne peuvent pas se faire aider comme le petit ouvrier malgache. »


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